\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0\u00a0 La crise sanitaire que nous sommes en train de vivre r\u00e9v\u00e8le, ou plut\u00f4t nous force \u00e0 regarder, l\u2019importance que rev\u00eat le soin dans nos vies. Le soin, c\u2019est-\u00e0-dire, l\u2019ensemble des gestes quotidiens que nous effectuons pour nous maintenir vivant.e.s et vivre au-del\u00e0 de la survie : laver, pr\u00e9parer, abreuver, nourrir, accompagner, soutenir,\u2026 Ces gestes, bien qu\u2019indispensables, sont encore largement d\u00e9valoris\u00e9s dans nos soci\u00e9t\u00e9s. Ils constituent pourtant la trame cach\u00e9e des vies clinquantes et spectacularis\u00e9es. Trame de l\u2019ordinaire, des corps, des blessures rafistol\u00e9es, trame essentielle pourtant, qui permet \u00e0 la vie de se maintenir et de se d\u00e9ployer.<\/span><\/strong><\/p>\nTout, dans nos soci\u00e9t\u00e9s, est mis en place pour nous permettre de d\u00e9tourner le regard de ce qui s\u2019affaisse, se fragilise, menace de disparaitre. On range les a\u00een\u00e9.e.s dans des hospices, les malades dans des h\u00f4pitaux, les handicap\u00e9.e.s, les \u00ab\u00a0folles\u00a0\u00bb et les \u00ab\u00a0fous\u00a0\u00bb dans des centres et des asiles, loin des regards, loin de ce qui constitue la norme, c\u2019est-\u00e0-dire, loin des individus capables de faire fonctionner la machine par leur travail et de fonctionner eux-m\u00eames comme des machines – \u00e0 supposer que ce genre d\u2019individu existe vraiment. On cache ce qui pourrait contredire l\u2019image de l\u2019\u00eatre humain ind\u00e9pendant, fort, m\u00fb par sa volont\u00e9 et libre de contraintes, ch\u00e8re \u00e0 nos soci\u00e9t\u00e9s n\u00e9olib\u00e9rales. Or, durant le confinement, ce rapport \u00e0 la visibilit\u00e9 et \u00e0 l\u2019espace s\u2019est invers\u00e9. Nous nous sommes toutes et tous cach\u00e9.e.s, rang\u00e9.e.s dans nos maisons, nos appartements, nos cases. Toutes et tous, sauf celles et ceux qui, bien avant la crise, assuraient d\u00e9j\u00e0 les soins envers les a\u00een\u00e9\u00b7es, les malades, les handicap\u00e9\u00b7es , les folles et les fous, envers les personnes vuln\u00e9rables – ce \u00ab\u00a0travail invisible\u00a0\u00bb.<\/span><\/p>\nD\u2019un coup, voil\u00e0 que les invisibles deviennent visibles, que les projecteurs se braquent sur la fragilit\u00e9, l\u2019affolement, la maladie, la mort et l\u2019urgence du soin. Les petites mains auparavant m\u00e9pris\u00e9.e.s sont les seules silhouettes mobiles dans un paysage d\u00e9sert\u00e9. Une partie du monde s\u2019arr\u00eate et s\u2019efface, l\u2019autre turbine et devient le centre de l\u2019attention. D\u2019un coup, voil\u00e0 que chacun.e est ramen\u00e9.e \u00e0 sa propre vuln\u00e9rabilit\u00e9, \u00e0 sa mort potentielle et \u00e0 celle de son entourage. Voil\u00e0 que nos interd\u00e9pendances et nos besoins primaires s\u2019affichent au grand jour : de la d\u00e9forestation aux maladies animales (responsables de l\u2019\u00e9mergence du virus), des animaux que nous sommes \u00e0 notre mortalit\u00e9 oubli\u00e9e, de notre \u00e9vidente mortalit\u00e9 au besoin d\u2019\u00eatre ensemble, du temps retrouv\u00e9 au besoin de marcher, de respirer hors des cellules de b\u00e9ton et du non-sens enseign\u00e9.<\/span><\/p>\nLa crise que nous sommes en train de vivre modifie-t-elle notre repr\u00e9sentation de\u00a0ce qui compte<\/em>\u00a0? Qui sont les personnes vuln\u00e9rables ? Qu\u2019est-ce que la vuln\u00e9rabilit\u00e9 et que peut-elle nous apprendre ? Depuis plusieurs d\u00e9cennies, les \u00e9tudes f\u00e9ministes proposent une autre approche de la notion de vuln\u00e9rabilit\u00e9, dans la lign\u00e9e des travaux sur l\u2019\u00e9thique du\u00a0care<\/em>. Ce point de vue philosophique et \u00e9thique se r\u00e9v\u00e8le particuli\u00e8rement \u00e9clairant pour nous aider \u00e0 saisir certains des enjeux soulev\u00e9s par la crise du COVID-19.\u00a0 (…)
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H\u00e9lo\u00efse Husquinet<\/span><\/p>\t\t\t\t\t\t<\/div>\n\t\t\t\t<\/div>\n\t\t\t\t